La mobilité domicile-travail et les temps de trajets des salariés, ont longtemps été en dehors du périmètre d’intervention des Directions des Ressources Humaines à l’exception de sujets réglementaires tels que la prise en charge obligatoire de la moitié du coût de l’abonnement de transport, deviennent progressivement des facteurs clés du recrutement et de la fidélisation des talents. En témoigne l’émergence de la fonction de Chief-Happiness Manager dont le nom suscite la curiosité. La qualité de vie au travail est au cœur des projets de transformation RH. En France, le coût du mal-être au travail est estimé à 12 600 euros par salarié dans le secteur privé, d’après une étude du cabinet Mozart Consulting de 2017.
Si le trajet domicile-travail relève d’une décision d’organisation individuelle du salarié, comment les DRH peuvent-ils s’emparer de ce sujet ?
De quels outils disposent-ils ou quelles démarches peuvent-ils lancer pour prendre le sujet à bras le corps ?
Estimer les temps de trajet et conditions de déplacement des salariés
Le préalable est de poser un diagnostic chiffré : mesurer les temps de trajets, les conditions de confort… Calculer l’ensemble de ces trajets, vers un ou plusieurs sites de travail, peut s’avérer compliqué : quel outil utiliser ? Comment rassurer les délégués du personnel, membres des CHSCT et CE quant à la fiabilité de la méthode ? Quels critères pour une évaluation homogène pour l’ensemble de la population ?
« Dans le cadre de notre politique RH de mobilité professionnelle, nous devons être davantage outillés en interne afin de répondre aux sollicitations de nos collaborateurs qui évoluent dans leurs fonctions. ‘Quel est le site le plus accessible en fonction de mon mode de transport ?’ nous demandent les collaborateurs. Nous devons leur apporter des réponses précises et fiables, c’est un élément clé dans la décision de changer de poste. » commente un Responsable RH d’une grande banque française.
Intégrer la dimension « mobilité » dans les politiques RH et dans le dialogue social
Une fois le diagnostic actuel posé, les conditions de déplacement et la diminution des temps de trajet peuvent être des éléments à prendre en compte dans les politiques RH. Ce diagnostic permet aux employeurs d’anticiper le thème de la mobilité dans le dialogue social.
En effet, l’entrée en vigueur de la Loi d’Orientation des Mobilités au 1er janvier 2020 impose le sujet de la mobilité des collaborateurs dans le cadre des Négociations Annuelles Obligatoires pour toutes les entreprises. A défaut d’accord, la mise en place du plan de mobilité employeur est obligatoire pour les entreprises réunissant au moins 50 salariés sur un même site.
A titre d’exemple, la LOM introduit un dispositif facultatif qui pourra être sollicité par les instances représentatives du personnel : le forfait mobilité durable***. Ce forfait a pour objectif d’encourager et de faciliter l’usage des mobilités partagées et des mobilités actives. Avec ce dispositif, l’employeur peut prendre en charge pour ses salariés les frais de carburant et les frais engagés pour les déplacements domicile-travail réalisés avec l’un des modes suivant : covoiturage, vélo ou vélo à assistance électrique, transports publics (hors abonnement) et autres services de mobilité partagée (par décret).
Le montant alloué peut aller jusqu’à 800€ par an et par salariés. Ce dispositif est exonéré de cotisations sociales pour l’entreprise et d’impôt sur le revenu pour le salarié. De plus, il est cumulable avec la prise en charge des transports en commun (dans la limite des 400€/an/salarié), et remplace l’indemnité kilométrique vélo. Dans certains groupes, ce critère fait déjà partie des négociations avec les instances représentatives du personnel : remboursement des notes de frais en fonction des modes de transports à disposition des salariés, niveau des indemnités versées dans le cas d’un déménagement, réflexion sur la mise en place du forfait mobilité durable pour gérer sa mobilité domicile-travail de manière plus souple et écologique…
Proposer des solutions de mobilité concrètes adaptées à chaque population
Parmi les grands groupes de conseil, dont le taux de turn-over est particulièrement élevé à 20% en moyenne*, nombreux sont ceux qui s’interrogent : comment optimiser la mobilité des consultants, population toujours en déplacement et passant facilement d’une entreprise à l’autre ? Faire du temps de trajet un critère dans les propositions d’affectation des salariés, définir une politique de mobilité du quotidien, proposer un aménagement des horaires de travail, du télétravail, du travail en tiers lieux (à l’instar de Capgemini** par exemple), instaurer des règles prioritaire dans l’accession aux places de stationnement peuvent faire partie du champ des actions possibles.
Une chose est sûre : chaque typologie de salariés a ses besoins propres en matière de mobilité du quotidien. Chacune doit faire l’objet d’une attention particulière afin d’adapter les solutions et répondre efficacement aux attentes.
** https://www.neo-nomade.com/blog/coworking-pour-les-salaries-d-entreprise/
*** Les modalités du dispositif seront fixées par décrets, prévus au mois d’avril 2020.